Noir, lumière, noir, lumière. Des voix, très loin, un bip bip et un vibreur. Karel se réveilla en sursaut et réalisa qu'elle s'était endormie dans une chambre vide. Elle se frotta les yeux et saisit son bipper. L'une de ses patientes, quelques chambres plus loin. Elle rattacha nerveusement ses cheveux avant de se précipiter au chevet d'Elisa Warmer. Une vieille femme de 35 ans, souffrant d'une défaillance cardiaque grave. Elle l'avait opérée trois jours plus tôt, et visiblement la greffe ne s'était pas passée aussi bien que prévu. Rien de très grave, mais c'était tout de même alarmant. Elle sortit alors devant la porte de la chambre et intercepta plusieurs collègues, pour leur demander leur avis. La jeune Elisa avait trois enfants, elle ne pouvait se permettre de risquer sa vie plus que de nécessaire.
La discussion qui s'en suivit fut des plus animées, et c'est à son grand regret que Karel dut se rendre à l'évidence. Elisa ne survivrait pas à une nouvelle intervention. Il fallait laisser la greffe faire son travail, et prier pour que cela suffise et qu'elle survive. Parfois, elle détestait son métier de chirurgien, parce qu'elle se savait impuissante. Combien de fois avait-elle vu ses patients mourir ? Elle s'adressa alors à ses collègues.
Vous savez, on a beau savoir que quand ils viennent nous voir, ils attendent un miracle, je ne me fais toujours pas à l'idée que des fois, on ne peut rien y faire.
Karel avait encore plus de mal à accepter cette idée depuis que son mari était décédé. Ce qu'elle ne savait pas, c'est que c'était cette présence, insupportable, qui en était la cause. Car Paula était là, juste derrière elle, son air hagard, perdu et désorienté fixant un à un les chirurgiens avant de se poser sur celui d'un autre fantôme. Surprise ! Karel ressentit brusquement la réaction de sa mère, et bien qu'elle ne sache pas ce qu'il se passait, elle paniqua. Pourquoi cette présence la suivait-elle toujours ?